|
Index I Productions des élèves I Des métiers et des hommes
|
Professeur de français
|
|
|
Voici
l’interview que nous avons réalisée avec mon oncle qui est à la
retraite, mais qui durant sa vie active a été professeur de français en
collège. |
|
Pourquoi as-tu eu envie d’exercer ce métier ?
J’ai eu envie d’exercer ce métier en sortant du lycée à la fin de mes
études secondaires parce que j’aimais beaucoup la lecture, la langue
française, et les professeurs en fonction de mes résultats scolaires
m’ont conseillé de m’orienter vers cette voie.
Où et quand as-tu commencé ta carrière ?
J’ai d’abord été surveillant, à l’époque il me fallait gagner un peu
d’argent pour pouvoir poursuivre mes études universitaires. À 20 ans,
j’ai été engagé comme surveillant dans un collège du Lot-et-Garonne.
J'ai travaillé dans plusieurs collèges et je ne devais que trois
journées de travail par semaine, ce qui me permettait d’aller à la fac
de lettres de Bordeaux pour y suivre mes cours.
Au bout de sept ans, mon contrat de surveillant a pris fin, et je suis
parti enseigner au Maroc en tant que professeur dans un lycée d’une
grande ville marocaine. Et c’est là que pour la première fois j’ai eu
devant moi des élèves à qui je devais enseigner le français :
c’était des Marocains, le français pour eux était une langue étrangère.
Mais le travail était bien celui auquel je me destinais. J’ai
commencé mon apprentissage comme ça, avec beaucoup plus de plaisirs et
de satisfactions que de déceptions.
Mais au bout de huit ans, mon contrat marocain a été fini, et j’ai dû
rentrer en France pour commencer enfin ma vraie carrière d’enseignant
en collège !
Quelle était la formation nécessaire pour devenir professeur ?
Après des études en faculté de lettres modernes (ou de lettres
classiques si l’on voulait enseigner aussi le latin), il fallait
obtenir une licence en trois ans. Et ensuite on devait réussir le CAPES
(c’est le Certificat d’Aptitude au Professorat dans l’Enseignement
Secondaire). C’était le véritable concours d’entrée dans
l’enseignement en collège et en lycée. (NDLR : Les conditions actuelles de l'accès au métier ont changé. Consulter la fiche métier de l'ONISEP pour en savoir plus.)
Existe-t-il d’autres parcours pour exercer ce métier ?
Aujourd’hui les enseignants sont parfois recrutés sans avoir passé ou
sans avoir réussi à décrocher le CAPES : ils peuvent être engagés comme
contractuel à partir d’un certain niveau de connaissances
universitaires que je ne sais pas évaluer, mais je pense qu’il
faut toujours au moins aujourd’hui une licence de lettres pour pouvoir
être professeur de français.
Quelles sont les tâches à accomplir ?
Il s’agit d’abord de préparer des cours, d’organiser nos séances, il
faut penser à organiser une progression en fonction des objectifs à
atteindre et du niveau des élèves. Il faut travailler pour toute une
classe en tenant compte des niveaux et des capacités différentes des
uns et des autres, il faut évidemment corriger les copies. Les
professeurs de français ont ce désavantage par rapport à ceux qui
travaillent dans d’autres matières d’avoir beaucoup de copies,
nécessaires pour des apprentissages dans différents domaines :
grammaire orthographe, conjugaison, expression écrite… Certains de ses
travaux comme les expressions écrites, les rédactions, demandent
souvent beaucoup de temps de correction et cela occupe une partie
de nos soirées, y compris les samedis, les dimanches, et une
partie des vacances intermédiaires. Il ne nous reste guère que les
dites grandes vacances d’été pour nous reposer vraiment.
Et je n’oublie pas les réunions administratives ou pédagogiques. Ce
sont beaucoup d’exigences différentes qui sont imposées par le métier
mais on s’y soumet.
Et il y a heureusement aussi de belles récompenses dans la réussite des
élèves, dans leur attitude positive le plus souvent. Et la relation
avec certains parents ou certains collègues également est aussi
stimulante et encourageante.
Qu’est-ce qui t’a plu dans ce métier, et quels en étaient les inconvénients ?
J’avais envie de me sentir utile, et aimais l’idée d’apprendre quelque
chose à des enfants et des adolescents, de partager l’amour que
j’avais pour la langue, pour les livres, la lecture, pour l’écriture
aussi, même si j’ai été quelques fois déçu. J’ai aimé le contact avec
les groupes classe, même si ça n’a pas été toujours facile évidemment.
Et bien sûr, il y avait aussi l’envie de profiter toute la vie des
longues vacances scolaires !
Quant aux inconvénients de ce métier, ils sont nombreux : il y
avait parfois beaucoup de travail, beaucoup plus que je ne pouvais en
fournir à certaines périodes de l’année, en particulier à la fin des
trimestres.
La relation a été parfois difficile avec certains élèves qui
m’empêchaient parfois de travailler comme je le voulais avec la classe
dans laquelle ils étaient. Et c’était frustrant et énervant. Je me
souviens encore de quelques-uns qui ne voulaient ni travailler ni me
laisser travailler.
La communication a été parfois difficile aussi avec certains parents,
peu nombreux heureusement, mais aussi avec des collègues ou mes
supérieurs hiérarchiques. L’enseignant exerce un métier de relation
humaine, et la relation humaine n’est pas toujours facile.
Existe-t-il des contre-indications spécifiques, des risques particuliers ?
Si on n’est pas doué pour le contact humain et si on n’aime pas les
enfants, il vaut mieux s’abstenir de faire ce genre de métier
évidemment. On n’y trouvera aucune satisfaction et on s’y usera très
vite. Il faut être capable de maitriser ses nerfs. Si on est quelqu’un
de très nerveux et d’excessivement autoritaire, la relation, surtout
dans la période actuelle, risque de dégénérer très vite à la fois avec
les élèves mais aussi avec leurs parents.
As-tu pensé à changer de métier ?
Je n’ai jamais sérieusement pensé à changer de métier, sauf dans
quelques rares moments difficiles où le découragement m’a fait douter
de mes capacités, mais comme je ne me savais bon à rien d’autre, je
n’ai jamais imaginé pouvoir bifurquer vers une autre voie
professionnelle. Je savais que je n’avais aucun talent particulier, ni
aucune capacité manuelle ou intellectuelle pour pouvoir changer de voie.
Quels sont tes conseils pour les personnes qui voudraient exercer le métier de professeur de français ?
Ayez un intérêt fort pour la langue française, les livres, la
lecture et l’écriture, et à la fois l’envie de communiquer et de
transmettre vos connaissances à des jeunes, mais aussi votre goût,
votre passion pour la langue, les romans, la poésie, le théâtre. Il
faut la passion, l’envie, la méthode (que l’on apprend avec le temps).
Ne vous découragez pas si les débuts sont décevants, un tel métier ne
s’apprend pas dans les livres.
Ne choisissez surtout pas ce métier pour y faire fortune, ni surtout
pour l’illusion des longues vacances, parce que là vous seriez très
rapidement et définitivement déçus !
Qu’est
ce qui ressort aujourd’hui de ton ancienne activité de professeur de
français dans ta vie quotidienne de retraité ? Est-ce qu’il y a
une continuité entre ces deux vies ?
Oui, deux de mes activités font une continuité qui me fait du bien,
entre ces deux périodes de ma vie. D’abord, c’est un ami éditeur qui me
fait confiance pour lire choisir avec lui les manuscrits qu’il
reçoit, et pour en être le correcteur. Ce qui me procure souvent des
échanges à la fois intéressants et très cordiaux avec les auteurs (ou
auteures).
Mais aussi, ce qui me donne beaucoup de plaisir aujourd’hui, c’est
d’organiser avec une ancienne collègue des séances de lectures
publiques dans un foyer d'handicapés de Tonneins. Les séances durent
une heure et demie chaque semaine, et le grand plaisir que j’ai, c’est
d’abord la manière dont nos lectures sont reçues et appréciées par le
petit public assidu qui assiste à ces séances.
Et enfin, autre grand plaisir pour moi, celui de continuer à fréquenter
les livres que j’ai à ma disposition et dans ma mémoire, d’y retrouver
certains passages, pages ou chapitres, de ressentir la joie de les
redécouvrir. Et encore, cette activité me permet de ressusciter des
livres qui dormaient, parfois depuis des années dans ma bibliothèque,
sans que j’aie eu le temps ou l’occasion de les lire. Donc, grâce à mes
auditeurs du foyer, je vis aujourd’hui dans une bibliothèque pleine de
vie et de mouvements : c’est un de mes plus grands plaisirs de
retraité.
Propos recueillis par Lina Boufangha, le 06/04/2022.
Crédits image : Tous droits réservés © Lina Boufangha
_________________________________________________
Voir aussi : fiche métier sur le site de l'ONISEP
(Pour la version longue, cliquer sur "+ d'infos".)
|
|
|
|
|
|
|
Interviews
|
|
Lina Boufangha , 5e 2 - 2021/2022
Collège Germillac
|
|
Vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant
(loi Informatique et Libertés N-2004-801 du 6 août 2004).
|
|
|
|